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Biais   d'humeurs    ...
1 décembre 2009

Eldorado, de Laurent Gaudé

Je ne pouvais pas rester sur la déception récente que m'avait procurée la lecture du Soleil des Scorta. Il fallait que je sache si vraiment, je m'étais trompée sur le compte de son auteur, et si aucun autre de ses romans ne me ferait retrouver la magie d'une narration que j'avais tant appréciée. Avec plus d'appréhension encore, j'ai donc ouvert il y a quelques jours Eldorado, qui n'a reçu aucun prix, et dont je n'avais pas du tout entendu parler. Sans même regarder la quatrième de couverture - je ne voulais rien déflorer. 

430_eldoradoEt voici que se déroulent les premières pages... c'est quitte ou double. Je me méfie maintenant des débuts prometteurs et qui jamais n'aboutissent, mais l'attente est vite écourtée ; d'emblée l'atmosphère s'installe, la tension se noue, le lecteur se fait capter, capturer : dans les ruelles d'un petit village, un homme sent dans son dos un lourd regard peser, une rencontre - anormale ? - va se produire ; et de cette rencontre va découler tout le roman : son amont, et son aval, son passé, et sa construction. Tout part de cette femme meurtrie, qui a quelque chose à dire et à revendiquer ; tout part de celui à qui elle le dit et dont elle va bouleverser la vie. Une troisième voix s'intercale et noue une intrigue parallèle, c'est à la confluence de ces voix que se construit le roman, qui jamais ne lasse ni ne déçoit. Accrochés que nous sommes aux fils de cette narration, il nous est impossible de laisser le roman en plan - ou pour si peu de temps... Plus de tournures incantatoires lassantes, non plus que de dissonances : le mot facilité me vient ; mais pas celle de l'écriture - plutôt celle d'une lecture absorbée, l'une de celles qui me fait presque oublier ce que je suis.

Aurais-je cherché à savoir de quel thème le livre traitait, que jamais je ne l'aurais lu ; j'avais déjà rencontré une histoire similaire dans l'une des nouvelles de Le Clézio (La Ronde et autres faits divers) et n'en avais guère été touchée. Mais Laurent Gaudé a une manière si particulière, si personnelle d'évoquer ces sentiments humains pourtant universels, qu'il remue au fond des coeurs une vague d'amertume, de tristesse et d'émotions mêlées, comme une reconnaissance universelle de la souffrance. Dès lors qu'il s'attache à un ou deux personnages seulement, qu'il explore au fond d'eux l'histoire de leurs motivations, son histoire résonne d'un ton juste, évident. Avec toujours cette vaste mer en arrière-plan, de préférence sous les étoiles - qui me font lui pardonner quelques ficelles un peu grossières parfois, et lui reconnaître un vrai talent.images

 

Une interview de Gaudé lors de la sortie du roman sur evene.fr

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Commentaires
M
Savyne, je ne l'ai pas lu sous un angle réaliste en fait...je trouve qu'on bascule, comme souvent, du côté mythique presque..<br /> Leil je suis entièrement de ton avis (merci pour le tag... je n'en raffole pas - des tags- mais suis touchée par son sens !)
L
Je ne suis pas du tout d'accord avec Nicolas. Comme quoi ...<br /> Gaudé laisse une empreinte et sa prose est facilement identifiable parmi d'autres. <br /> <br /> (NB : Tu as un tag chez moi : http://leiloona.canalblog.com/archives/2009/12/08/16076677.html )<br /> <br /> :))
S
Le livre a inspiré deux lycéennes : on peut le visionner là : http://www.lpolouhans.com/documents/Eldorado.zip<br /> J'ai adoré ce roman qui m'a fait comprendre un peu mieux dans quel monde nous vivons. Aujourd'hui, il n'y a plus de centre d'accueil à Lampedusa. Tout est vide, déserté. Mais les pauvres gens embarqués, eux, existent toujours. Où sont-ils accueillis? Que deviennent-ils? Le mérite de Laurent Gaudé est d'avoir attiré notre attention sur cette facette de notre réalité, et avec quel talent, n'est-ce-pas?
M
--> Stephie, je crois que c'est aussi mon intention !<br /> <br /> --> Nicolas : je comprends cette position, mais pour ma part, je garde vraiment un souvenir génial du roi Tsongor. J'ai beaucoup aimé Eldorado mais pas autant, c'est vrai.
N
Personnellement j'ai largement préféré Le soleil des Scorta. Mais le problème des romans de Gaudé, c'est que, pour la plupart, ils ne laissent pas de souvenir impérissable. Il manque quelque chose pour que Gaudé doit un grand écrivain. Et Eldorado appartient à ces romans qu'on oublie finalement assez vite, malgré la force du thème traité.
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